20 Minutes le 1er Juillet

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Laurence Parisot : "Le kite à Saint-Barth, ça vous remet l'économie française en perspective"
Haut dans les airs, qu'elle est Laurence Parisot.
Elle plane même à 10 000, la sainte-patronne du Cac 40.
Bien au-dessus de la mêlée de ces feignants de smicards et autres enfoirés de syndicalistes.
 
Ce n'est pas vraiment une nouveauté : celle qui a pris en juillet 2005 la succession d'Ernest-Antoine à la tête du Medef s'est depuis souvent fait remarquer en assénant quelques vérités dérangeantes.
De ces glorieuses assertions dont seuls les esprits obtus s'entêtent à ne pas comprendre la subtilité.
"La liberté de penser s'arrête là où commence le code du travail", a finement noté la brave dame.
"La précarité est une loi de la condition humaine", a tout aussi remarquablement philosophé celle qui, héritière d'une fortune familiale, n'en est pas franchement le meilleur exemple.
"La pression fiscale et sociale qui pèse sur les entreprises françaises est la plus élevée au monde. L'ensemble des prélèvements obligatoires qui pèse sur les entreprises françaises s'élève à 280 milliards d'euros", a aussi dénoncé bille en tête, voilà quelques jours, la patronne en chef. Laquelle fait preuve d'une mémoire très sélective en oubliant de préciser qu'un rapport du Conseil économique pour l'emploi chiffrait les aides publiques aux entrepreneurs français à la bagatelle de 60 milliards d'euros en 2005.
Bref, Laurence Parisot est à l'image de la majorité au pouvoir : décomplexée.
Et libérale.
Ce qui n'est pas un gros mot, n'est-ce pas, Laurence ? 
Oui : "Aucun des candidats n'a compris que le libéralisme est un facteur de progrès social", avançait pendant la campagne présidentielle l'amie de Christine Lagarde.
La bonne nouvelle, c'est que Laurence ne se contente pas de critiquer.
Des fois, elle prend acte des indéniables avancées sociales qu'elle n'a pas manqué de susciter
Il n'aura ainsi pas échappé à la passionaria des patrons que l'augmentation du Smic annoncée par Xavier Bertrand prenait effet à partir d'aujourd'hui.
Pas une augmentation au rabais.
Ouhlàlà : pas du tout.
C'est que pour "garantir le pouvoir d'achat", ce sale gauchiste de Bertrand n'a pas hésité à y aller à fond.
Soit une hausse de 2,1 %.
Et un Smic qui s'affiche désormais à 1 000 € net.
Carrément.
raison de 2,5 millions de Smicards français, l'augmentation fait d'ailleurs un foutu paquet d'heureux.
De ces privilégiés dont on pourrait craindre qu'ils s'endorment sur leur énorme paquet de noisettes.
On pourrait...
Si Laurence n'était pas là.
Si la madone des patrons répugnait à aller à contre-courant de la pensée unique gauchisante.
Si elle laissait sa sensibilité prendre le pas sur la mission qu'elle s'est fixée.
Si elle se lassait de nous abreuver de ses vérités bien senties, propres à remettre un peu de sens des réalités dans une économie qui, à force de tendre à "une fonctionnarisation (...) proche de l'utopie communiste", tourne en dépit du bon sens.
Heureusement, Challenges nous l'apprend, Laurence ne lâche pas l'affaire.
Elle "continue son combat".
Et la grande prêtresse du Medef est d'autant plus déterminée à "se battre" qu'elle a enfin l'impression de ne plus prêcher dans le désert.
Qu'elle se sent encouragée par la forte brise libérale qui s'est levée.
Oui : la même que celle qui lui permet, en "championne émérite", de sillonner sur son kite les eaux de Saint Barth .
Solidement accrochée au harnais, bien calée dans le souffle des Alizées, la grande prêtresse du Medef s'est rendue compte que son combat pour une parole vraie n'avait pas été inutile. 
"L'opinion accepte désormais un discours non démagogique , et même le réclame : éviter le référendum européen , oser évoquer la question du contrat de travail, refuser le coup de pouce au smic...", se rengorge la péronnelle devant la journaliste de Challenges.
Il était temps, histoire de "sauver la compétitivité des entreprises françaises et pour que le smic ne se transforme pas en salaire à vie."
C'est vrai, avait-elle aussi expliqué à la Tribune, "en trois ans, le Smic a augmenté de 17 %. (...) s'il augmente au delà de l'inflation et des gains de productivité, il coûte plus cher que ce que l'entreprise peut supporter."
Diantre, on a eu chaud.
2 ou 3 % d'augmentation de plus et la compétitivité des entreprises françaises s'effondrait : ces salauds de Smicards, pourtant déjà grassement payés, ont bien failli nous foutre dans la merde avec leurs exigences salariales inconsidérées.
Mais ce coup-ci, l'opinion ne s'est pas laissée embrouiller par les "discours démagogiques".
Ouf.
PS : On va encore nous traiter de gauchiste, mais on ne peut s'empêcher de noter que Laurence, en tant que 276e fortune française, fait partie de ces 0,01 % de Français les plus fortunés qui, selon une étude l'Ecole d'économie de Paris, ont vu leurs revenus augmenter de 42,5 % entre 1998 et 2005.
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